Archéologies

Dans l’immense champ des « Archéologies », l’abstraction géométrique
épure des formes archaïques.

Du fragment aux géométries…

Tessa Tristan

Critique d’art

Toutes les « Archéologies blanches » (1974-85) conjuguent conceptualité et figuration graphique en hybrides d’une saveur inédite, cernés de noir, qu’une couleur buvardée volumise (le rose pompéien) et que scande le mot tamponné (NUCLEUS, FIGURE/DANGER, FRAGILE, etc.).

La forme une fois trouvée devient modèle déposé dans les mémoires. Il passe des premiers labyrinthes et paysages de formules algébriques encore à décrypter, à des inventaires d’objets extraits de tombes (ossements, squelettes transmués, nucléus, masque, crâne, écus, heaumes, lame) ou de formes végétalisées en palmes exotiques (dans la variante « Pour Saint-John Perse »).

La remise en question de la figure par elle-même se joue entre le passé mythique de son devenir et le devenir mythique de son passé. Entre le signe et la figure, entre volonté de stylisation et évocation naturaliste, Maccheroni s’intéresse au fragment comme moyen d’appréhender l’essentialité, par à-coups intuitifs : ces formes disjointes, destinées à être remontées, s’achèvent intellectuellement à partir de ce qui est donné à voir (« Archéologies blanche et bronze » ; « Archéologies bronze, Terres Étrusques et Carrés bronze », 1983-88).

L’œuvre macchéronienne est une condensation de forces en objet-pouvoir. Comme les « Méditations africaines », les « TAU » (1987-1988) sont un prolongement des « Méditations archéologiques » (1986-95), tout en symétries décalées, confirmant obstinément ce pari perceptuel : « C’est le dépassement de la figure par la figure. Au lieu d’aller vers le motif extérieur, je vais vers celui intérieur… »

Dans ses séries sur l’« Égypte » (circa 1977-1989), Maccheroni joue avec la connotation symbolique d’éléments simples pour traduire son Égypte rêvée. Le bleu – gamme de bleus aux nuances diaprées – vient irriguer formes et matières à la façon d’une eau vive (« Égypte-bleu », 1ere et 2e série) ; la bande – de lin ou papier – tressée, superposée, structure dans l’horizon du carré un espace de réclusion (Cartouches, « Égypte-bleu » 3e série) ; le lin bistre, écru, naturel vient envelopper l’œuvre croisée/livre d’artiste avec Raphaël Monticelli ; et le sable immémorial (figuré par l’emploi de cartons de cette couleur) pour son immensité de désert. Suspendus dans l’espace de la feuille où déambule l’écriture de Michel Butor, les Cartouches en œuvres croisées font panoramas.