Eros et Thanatos
La galerie
La queste de la Figure promise
Comme tout voyage initiatique, il faudra nécessairement s’engager sur la voie du détachement, du renoncement et de l’abstraction afin de concentrer toute l’énergie de la recherche sur son but ultime, seul et unique : l’approximation infinie et l’inépuisable figuration de la mandorle féminine en tous états, en tout mystère, en toute puissance de suggestion érotique.
Toutes les autres plages du corps, communément associées à l’aventure du désir, seront tenues dans l’ombre : le visage, la chevelure, les seins, les membres, à l’exception de la main, évoquée dans son œuvre de caresse, et le pubis même ne sortiront pas des limbes d’absence d’où le sexe seul s’est détaché.
On pourrait croire à l’idolâtrie, à l’objectivation pesante et univoque du Même, saisi dans un lot plus ou moins ingénieux de mises en scènes. Mais c’est bien au-delà que porte la démarche. Il ne s’agit pas d’objet mais de présence. Non de répétition mais de renouvellement. Et rien de narratif, pas d’anecdote, pas de démonstration, pas d’autre partis pris que la célébration de la beauté du sexe de la femme.
Cependant l’approche sur de longues années, de cette inouïe capitale du désir, s’opère par des voies stylistiques qui forment comme autant d’étapes sur le chemin de la figuration. L’initiation se déroule et s’accomplit, progressivement, par l’investissement de trois ordres de la nature : animal, végétal et minéral, comme si le quêteur, parti à la recherche d’un horizon de vérité dont le sexe, en son image, serait porteur, remontait le fil des ères de la création et s’enfonçait peu à peu dans l’antériorité des origines.
On découvre ainsi, comme dans un songe voisin de la grande rêverie d’Empédocle sur ce que furent les ébauches de la vie et des vivants, que le sexe de la femme, au degré le plus XXXX de son approche, révéla son appartenance à l’animalité des mollusques de terre et d’eau, aux formes indéfinies, aux plis et replis engorgés de leur substrat, au profil tracé dans la délicatesse, au bourgeonnement gonflé de promesses. Et ailleurs, comme à un degré plus archaïque et d’une troublante analogie, on peut suivre un destin de plantes ou de fleur, d’algue ou de mousse jusque dans le modelé de la chair la plus intime – une végétalité d’ombre aquatique allant à se hausser vers des formes de bulbes ou de corolles, images lancinantes de ce qui dût appartenir, au commencement, au paradis terrestre. Enfin, et c’est encore le secret d’une œuvre quasiment inédite et, pour ainsi dire, l’apogée du processus d’abstraction photographique, on saisit par le regard la minéralité de fond du sexe féminin, sa réalité première de formation géologique, sa filiation radicale à la terre des origines, selon des compacités d’une argile que le désir a brulée.
Aux antipodes de toute vulgarité pornographique, les photographies de sexe d’Henri Maccheroni forment une œuvre à la dimension initiatique, en laquelle confluent et s’alimentent incessamment sources érotiques et conscience d’enracinement de l’être dans les mythes de la nature et de la création.
Claude Louis-Combet
Écrivain
HENRI MACCHERONI
Le visiteur des vanités
Alain Freixe
Poète
Hier, bougies, miroirs, livres défilaient au côté de crânes, symboles de mort pour un Memento mori inlassablement répété. Henri Maccheroni est le premier à oser associer le sec des os de la tête de mort aux lèvres humides de vie du sexe féminin.
Le vent de la vanité que fait souffler Henri Maccheroni n’est pas force de dispersion mais d’éclairement
Si quelque chose nous pousse depuis les arrières, c’est dans l’émoi d’un point de déchirure, d’un point de section qui voit à l’aigu d’une rencontre, les forces du sexe et de la mort se tenir, se contenir – vie dans mort et non mort dans vie ! – se retenir, se reposer dans leurs tensions.
Henri Maccheroni est l’homme d’une transaction secrète où c’est la vie qui gagne.